Bulletin N°18

Les cellules microgliales de repeuplement présentent un transcriptome spécifique et inhibent les mécanismes médullaires de la douleur – Cell Reports - Février 2024

Lauren J. Donovan et al.

Des modèles animaux de douleur neuropathique ont permis de montrer le rôle physiopathologique des cellules microgliales de la moelle épinière.  Dans cette étude, les auteurs ont utilisé une stratégie de KO conditionnel et inductible pour dépléter transitoirement les cellules microgliales. Chez ces souris, l’analyse d’un modèle de douleur neuropathique montre de façon inattendue que la phase de reconstitution microglial est associée à une résolution complète de la douleur. Les cellules microgliales de repeuplement sont distinctes des cellules microgliales témoins, aux plans morphologique et transcriptomique. Ces cellules expriment notamment des réseaux génomiques liés à la phagocytose et à la réponse au stress. Sur la base de ces résultats et en utilisant des approches bioinformatiques de data mining, les auteurs identifient un ensemble de gènes microgliaux humains qui sont potentiellement relevants dans le contexte des douleurs neuropathiques.

Les cellules microgliales régulent le sommeil en modulant la signalisation calcique de la norépinéphrine – Nature Neuroscience – Janvier 2024

Chenyan Ma et al.

Dans cette étude, les auteurs ont utilisé une approche de chémogénétique pour activer de manière inductible le signal des proteines G inhibitrices (Gi) dans les cellules microgliales de souris. L'activation chémogénétique du signal Gi microgliale a fortement augmenté le temps de sommeil. L’effet inverse a été obtenu par un blocage pharmacologique de P2Y12 (récepteur à l’ADP et à l’ATP couplé à une protéine Gi). L'imagerie par microscopie biphotonique montre que l'activation de P2Y12-Gi augmente le Ca2+ intracellulaire dans les cellules microgliales, et que le blocage de cette signalisation calcique abolit l'augmentation de temps de sommeil induite par P2Y12-Gi. Les auteurs rapportent également que les taux microgliaux de Ca2+ cytoplasmique augmentent physiologiquement lors des phases de transition de l’état d’éveil à l’état de sommeil.  L’utilisation d’un biosenseur de la norépinephrine démontre que ces modifications de concentration calcique sont induites par une activation de P2Y12-Gi conduisant à une réduction des taux de norépinéphrine.

L'immunothérapie anti-amyloïde par l’anticorps aducanumab induit des altérations microgliales et immunitaires durables – Journal of Experimental medicine – Janvier 2024

Mika P.Cadiz et al.

 L'aducanumab, un anticorps monoclonal dirigé contre la protéine amyloïde, réduit significativement les plaques d’amyloide beta chez les patients atteints de maladie d'Alzheimer.  Dans cette étude, les auteurs ont utilisé le modèle murin amyloïde APP/PS1 pour étudier les effets chroniques d’une administration ponctuelle d’aducanumab. Les résultats montrent qu’un traitement aigu par aducanumab peut réduire les signes neuropathologiques sur une durée maximale de 15 semaines. Ces effets comprennent une réduction de la taille des plaques d’amyloïde, un recrutement microglial vers les plaques et le développement d’un programme d’activation microglial pro-phagocytaire. Après l'arrêt du traitement, la ré-augmentation de la taille des plaques coïncide avec la perte de la signature génomique pro-phagocytaire dans les cellules microgliales. Ces résultats suggèrent que l’impact de l’aducanumab sur l’activation microgliale est transitoire et réversible.

Les lymphocytes T infiltrant les tumeurs cérébrales pédiatriques présentent une expansion clonale et des propriétés effectrices – Nature cancer – Janvier 2024

Aditi Upadhye et al.

Dans cette étude, les auteurs ont utilisé la technique de RNA-seq sur cellule unique (« single-cell RNA-seq ») pour analyser la transcriptomique lymphocytaire de tumeurs cérébrales pédiatriques.  Les résultats montrent qu'une large fraction des lymphocytes T intratumoraux résultent d’une expansion clonale qui suggère leur potentiel à reconnaître des antigènes tumoraux. Ces clones de lymphocytes T  présentent une signature génomique reflétant leur fonction effectrice, leur localisation tissulaire, des mécanismes de checkpoint immunitaire (« immune checkpoint ») et l’activation en réponse à des néoantigènes. Les auteurs identifient des néoantigènes candidats et montrent une survie augmentée chez les patients présentant une activation lymphocytaire dirigée contre ces néoantigènes. Au sein de la cohorte étudiée, on observe une hétérogénéité substantielle dans le degré d'expansion clonale et l'ampleur de la réponse lymphocytaire contre ces néoantigènes. Les auteurs concluent qu’une stratification basée sur des analyses génomiques et/ou fonctionnelles des lymphocytes T intratumoraux permettrait de sélectionner les patients susceptibles de mieux répondre à l'immunothérapie.

Rompre l'immunosuppression induite par la voie NGF–TrkA favorise l’efficacité de l’immunothérapie du mélanome – Nature immunology – Janvier 2024

Tao Yin et al.

Les auteurs de cette étude émettent l’hypothèse que, de par leur origine neuroectodermique, les cellules de mélanome pourraient exploiter leur valence neurale pour inhiber la réponse immune anti-tumorale. Ce travail montre que le facteur de croissance NGF (« nerve growth factor ») exerce de façon autocrine une activation de son récepteur, TrkA, induisant en retour une désensibilisation des cellules de mélanome à la signalisation Interféron-gamma. Il en résulte une capacité réduite des cellules de mélanome à induire le chimiotactisme des lymphocytes T et des cellules « natural killer » (cellules NK). Le NGF sécrété par les cellules de mélanome exerce également une activité paracrine sur les lymphocytes T se traduisant par une atténuation du signal d’activation induit par le TCR (« T-cell receptor ») et donc d'une diminution des fonctions effectrices T. Chez la souris, l'inhibition du NGF, soit par modification génétique, soit par l'inhibiteur pharmacologique larotrectinib, rend les cellules de mélanome sensibles à l’immunothérapie par blocage des molécules de checkpoint immunitaire. Dans ces conditions expérimentales, on observe également une amplification de l'immunité à long terme via une activation des lymphocytes T mémoires à faible affinité. Ces résultats identifient l'axe NGF–TrkA comme un important suppresseur de l'immunité anti-mélanome et suggèrent que le larotrectinib pourrait être utilisé dans une stratégie de sensibilisation immunitaire.