Bulletin N°32

Le ciblage de TAK1 dans la microglie réduit le syndrome de neurotoxicité associé au traitement par les cellules CAR T - Nature Cancer – Mai 2024

Janaki Manoja Vinnakota et al.

Chez les patients atteints de cancer, l’immunothérapie par injection de cellules T à récepteur antigénique chimérique (« CAR T-cells ») peut provoquer des symptômes neurologiques regroupés sous le terme « immune effector cell-associated neurotoxicity syndrome » (ICANS). Cependant, les mécanismes moléculaires conduisant à l'ICANS sont mal compris. Dans cette étude, les auteurs montrent que, chez des souris porteuses de lymphome B, le transfert de cellules CAR T dirigées contre l’antigène CD19 (CAR19) induit des déficits neurocognitifs associés à une activation microgliale. Dans la microglie activée, on observe un engagement de la voie Tak1 NF-κB-p38 MAPK. Par ailleurs, l'inhibition pharmacologique de Tak1 ou la délétion génétique de Tak1 dans la microglie entraîne une réduction de l'activation microgliale ainsi qu’une amélioration des fonctions cognitives, sans altérer l’effet thérapeutique des cellules CAR T. Chez les patients atteints d'ICANS, l’imagerie in vivo TSPO PET met en évidence une activation microgliale et l’imagerie par cytométrie de masse révèle un switch de l’état de microglie au repos vers celui de microglie activée. Ces résultats invitent à tester l'inhibition de TAK1 pour la prévention de l'ICANS chez les patients traités par CAR19.

Le vieillissement physiologique et la sénescence cellulaire induites par l'inflammation pourraient contribuer à la dysfonction oligodendrocytaire dans la sclérose en plaques - Acta Neuropathologica – Mai 2024

Farina Windener et al.

Dans cet article, les auteurs ont généré des oligodendrocytes à partir de cellules souches pluripotentes induites (iPSCs pour "induced pluripotent stem cells") dérivant de sujets humains jeunes, adultes ou âgés. Les auteurs ont ainsi observé que la proportion d’oligodendrocytes matures générés via cette approche diminue avec l'âge des donneurs. Ce phénomène est associé à une augmentation de la production oligodendrocytaire de dérivés réactifs de l’oxygène (ROS = « reactive oxygen species ») et une régulation à la hausse des marqueurs de sénescence cellulaire tels que CDKN1A et CDKN2A. La comparaison des profils transcriptomiques entre oligodendrocyte issus de donneurs âgés vs adultes révèle 1324 gènes différentiellement exprimés et un chevauchement limité avec les gènes identifiés par comparaison fibroblastes âgés vs adultes ou neurones âges vs adultes.  Des analyses du méthylome réalisées sur les oligodendrocytes cultivés et sur des échantillons de substance blanche humaine montrent que les âges chronologique et épigénétique sont corrélés, permettant ainsi l'identification d'une signature épigénétique spécifique à l'âge. De façon intéressante, les auteurs montrent un vieillissement épigénétique accéléré dans la substance blanche d’apparence normale (NAWM pour « normal-appearing white matter ») des patients atteints de sclérose en plaques (SEP). Par ailleurs, une différenciation oligodendrocytaire altérée et une régulation à la hausse des marqueurs de sénescence cellulaire peut être induite in vitro lorsque des oligodendrocytes issus de sujets jeunes sont cultivés en présence d’un surnageant de cultures microgliales pro-inflammatoires. En résumé, le vieillissement physiologique ainsi que la sénescence cellulaire induites par l'inflammation pourraient contribuer à la pathologie oligodendrocytaire dans les maladies inflammatoires démyélinisantes telles que la SEP.

Les Bacteroides inhibent l’élimination microgliale de l'amyloïde-bêta et favorisent le dépôt de plaques dans différents modèles murins de la maladie d'Alzheimer - Nature Communications – Mai 2024

Caroline Wasén et al.

Le microbiote intestinal des patients atteints de maladie d’Alzheimer (AD) est caractérisé par une accumulation de Bacteroides qui est corrélée au niveaux intrathécaux (= dans le liquide céphalo-rachidien) d'amyloïde-β (Aβ) et de protéine tau. Dans cet article, les auteurs montrent que l'administration de Bacteroides fragilis à des souris APP/PS1 augmente la charge en plaques d'Aβ, module l'expression des gènes corticaux impliqués dans la protéolyse de l'amyloïde et réduit l'expression des gènes microgliaux liés à la phagocytose et la dégradation protéique. De plus, l'administration de Bacteroides fragilis à des souris sauvages âgées inhibe l’activité phagocytaire exercée par les cellules microgliales sur des peptides amyloïde-β Aβ1-42 injectés dans l'hippocampe. A contrario, la déplétion des Bacteroidota murines avec le métronidazole diminue la charge amyloïde chez les souris 5XFAD âgées et active les voies microgliales liées à la phagocytose, à la signalisation des cytokines et à la dégradation lysosomale. Cette étude démontre que les membres du phylum Bacteroidota contribuent à la pathogenèse de l'AD en inhibant les fonctions phagocytaires des cellules microgliales, ce qui entraîne une clairance réduite de l'Aβ et une accumulation de plaques amyloïdes.

Dans le cerveau post-AVC, l’hétérogénéité phénotypique et spatiale des cellules myéloïdes cérébrales est liée à l'ontogénie cellulaire, aux dommages tissulaires et à la connectivité cérébrale - Cell Reports – Mai 2024

Anirudh Patir et al.

Les résultats de cette étude montrent que dans le cerveau post-AVC (accident vasculaire cérébral) de souris, les cellules microgliales et les populations myéloïdes dérivées de monocytes engagent des programmes d’activations multiples et distincts, déterminés par leur origine et leur localisation. Notamment, la proximité avec la zone infarcie ainsi que les connexions cérébrales entre cette zone et des régions cérébrales distantes sous-tendent l'accumulation et les modifications de réactivité cellulaire observés localement et à distance. Ces observations suggèrent une réponse myéloïde à la fois globale et régie par les connexions anatomiques dans le cerveau post-AVC. Les différents phénotypes myéloïdes identifiés résultent de l'interaction entre des facteurs intrinsèques déterminés par l’ontogénie, l’exposition à des dommages cérébraux organisés spatialement et un ensemble de signaux neuro-axonaux.

Chez le poisson zèbre, une thérapie de repopulation microgliale par transplantation de macrophages permet de traiter un modèle de leucodystrophie liée à une déficience en RNASET2 – PNAS – Avril 2024

Holly A. Rutherford et al.

La leucodystrophie liée à une déficience en RNASET2 est une maladie infantile rare pouvant mimer une infection virale et entraîner un grave handicap psychomoteur. Les mécanismes cellulaires de sa pathogénèse sont peu compris et il n'existe aucun traitement. Des recherches récentes utilisant le modèle mutant rnaset2 chez le poisson zèbre ont suggéré que les cellules microgliales pourraient être incriminées en raison de leur incapacité à digérer les débris apoptotiques pendant le développement du système nerveux central. Dans cet article, les auteurs rapportent les résultats d’une stratégie de remplacement des cellules microgliales par la transplantation de macrophages dérivés de la moelle rénale (équivalent chez le poisson zèbre de la moelle osseuse chez les mammifères) adulte. L’imagerie in vivo révèle que les macrophages adultes dérivés de la transplantation peuvent coloniser le cerveau embryonnaire des hôtes déficients et exprimer des marqueurs spécifiques des cellules microgliales.  Ces cellules greffées persistent au-delà des stades embryonnaires, éliminent les cellules apoptotiques cérébrales et réduisent la réaction immune de type réponse antivirale observée chez les larves mutantes. Il en découle une réduction de la neuroinflammation, une récupération comportementale et une restauration de l'activité motrice des mutants rnaset2, aux stades embryonnaires et juvéniles.

Les brèves du Bulletin N°32 

 

Article N°1

Richard G. Everson et al.

Dans le gliome malin, les agonistes des TLR polarisent les réponses à l'interféron en conjonction avec la vaccination par cellules dendritiques : résultats d’un essai randomisé de phase II.

Nature Communications – Mai 2024

 

Article N°2

Bina Lee et al.

Le SARS-CoV-2 exacerbe les anomalies cellulaires associées à la maladie de Parkinson dans des cultures de neurones dopaminergiques humains et dans un modèle murin in vivo.

Cell Reports Medicine – Mai 2024

 

Article N°3

Li Wang et al.

Cibler l'axe HSP47-collagène inhibe les métastases cérébrales en inversant la polarisation de la microglie M2 et en restaurant l'immunité anti-tumorale.

Cell Reports Medicine – Mai 2024