Bulletin N°42

Le facteur de transcription IRF8 définit le paysage épigénétique des cellules microgliales postnatales et oriente leur programme transcriptomique - Nature Immunology – Septembre 2024

Keita Saeki et al.

Bien que le facteur de transcription IRF8 soit fortement exprimé par la microglie, son rôle dans le développement des cellules microgliales postnatales reste inconnu. Dans cet article, les auteurs montrent que jusqu’au 14ième jour post-natal, IRF8 occupe un nombre croissant de sites « enhancers », en association avec les facteurs de transcription Sall1 et PU.1. L’interaction IRF8-enhancers été corrélée à une augmentation progressive de l'accessibilité de la chromatine, précédant l'initiation du transcriptome spécifique des cellules microgliales post-natales. Cette signature microgliale physiologique est profondément altérée par un KO post-natal d’IRF8. On observe alors un profil transcriptomique similaire aux programmes d’activation microgliale associés aux maladies (DAM pour « disease associated microglia »). Une analyse combinée par RNA-seq sur cellule unique (« single-cell RNA-seq ») et ATAC-seq sur cellule unique (« single-cell ATAC-seq »)  révèle une corrélation entre l'accessibilité de la chromatine et le transcriptome. IRF8 est également nécessaire au développement du méthylome (ensemble des sites de méthylation de l’ADN) spécifiques aux cellules microgliales. Enfin, dans le modèle de maladie d’Alzheimer 5xFAD, le KO postnatale d'Irf8 induit une réduction des interactions entre microglies et plaques amyloïdes-β, une diminution de la taille des plaques et une atténuation de la perte neuronale.

Le facteur de transcription EGR2 atténue l'uvéite auto-immune via l’activation de GDF15 et la modulation du phénotype microgliale rétinien - PNAS - Septembre 2024

Wanqian Li et al.                  

Dans cette étude, les auteurs analysent un modèle murin d'uvéite auto-immune expérimentale (EAU pour « experimental autoimmune uveitis ») et observent une diminution de l'expression d'EGR2 dans les cellules microgliales rétiniennes. De la même façon, EGR2 est régulé à la baisse après activation de la lignée cellulaire microgliale humaine HMC3. Le KO conditionnel d’EGR2 dans la microglie entraîne une augmentation de l'inflammation intraoculaire dans le modèle d’EAU. A contrario, la surexpression d'EGR2 réduit l'expression des cytokines inflammatoires ainsi que la migration et la prolifération des cellules HMC3. Les analyses transcriptomiques et de ChIP-PCR ont indiqué qu'EGR2 régulait la transcription de GDF15 en se liant à une séquence régulatrice localisée en amont de GDF15. De plus, l'injection intravitréenne de protéine recombinante GDF15 permet d'atténuer la progression de l'EAU in vivo. Enfin, l'invalidation de GDF15 inverse le phénotype inflammatoire microglial induit par la surexpression d'EGR2 in vitro.

La Cdk5 induite par les astrocytes accélère les métastases cérébrales du cancer du sein en supprimant l'expression du CMH-I pour échapper à la reconnaissance immunitaire - Nature Cell Biology - Septembre 2024

Arseniy E. Yuzhalin et al.

Cette étude montre que chez la souris, les astrocytes cérébraux facilitent la croissance des métastases cérébrales de cancer du sein (MCCS) en induisant la surexpression de l’enzyme cdk5, normalement exprimée par les neurones. Les MCCS surexprimant Cdk5 présentent une expression réduite des molécules MHC classe I et une diminution de leurs capacités à présenter les antigènes tumoraux.  Les études fonctionnelles et l’analyse par RNA-seq sur cellule unique montrent que ces anomalies sont inversées par l’inhibition génétique ou pharmacologique de cdk5.  Sur le plan mécanistique, Cdk5 réprime l’expression des gènes MHC classe I via la voie Irf2bp1Stat1importine αNlrc5. Les MCCS échappent ainsi à la reconnaissance immune des antigènes tumoraux par les lymphocytes T.  Chez la souris, un traitement systémique par la roscovitine —un inhibiteur de Cdk5 actuellement en développement clinique—seul ou en combinaison avec des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (« immune checkpoint inhibitors »), réduit de manière significative le nombre de MCCS et augmente la densité de lymphocytes CD8+ fonctionnels infiltrant les métastases.

Greffe de progéniteurs microgliaux allogéniques pour le traitement des maladies du système nerveux central : essais précliniques dans plusieurs modèles murins de mucopolysaccharidoses - Nature Communications - Septembre 2024

Panagiotis Douvaras et al.

Les mucopolysaccharidoses  (MPS) sont des troubles métaboliques héréditaires impliquant les enzymes lysosomales nécessaires à la dégradation des glycosaminoglycanes. L'accumulation de glycosaminoglycanes entraîne une maladie dégénérative progressive et systémique, impliquant notamment le système nerveux central (SNC) ce qui provoque des retards de développement et/ou une régression des acquis et une mortalité précoce. Les traitements actuels ne parviennent pas à corriger efficacement les troubles neurologiques associés aux mucopolysaccharidoses.  Dans cet article, les auteurs montrent que les progéniteurs de microglies dérivés de cellules souches pluripotentes induites (iPSC) humaines, possédant des niveaux normaux d'enzymes lysosomales, peuvent délivrer in vitro des enzymes fonctionnelles dans quatre sous-types de lignées cellulaires knock-out reproduisant les anomalies génétiques de MPS. Le transfert intercellulaire de ces enzymes est réalisé via un processus d’endocytose médié par les récepteurs au mannose-6-phosphate. Chez la souris, dans deux modèles différents de MPS, les résultats indiquent qu'une seule administration intra-cérébro-ventriculaire (= dans les ventricules cérébraux) de ces progéniteurs microgliaux  « prêt à l’emploi » permet de réduire l'accumulation toxique de glycosaminoglycanes et prévient les déficits neurologiques. De plus, une efficacité durable est observée huit mois après transplantation.

Caractérisation d’un modèle de poisson zèbre exprimant la protéine Tau humaine pour mimer la paralysie supranucléaire progressive : identification de Brd4 comme un régulateur de l'élimination synaptique par la microglie - Nature Communications - Septembre

Qing Bai et al.

La paralysie supranucléaire progressive (PSP) est une maladie dégénérative incurable du système nerveux central, caractérisée par l'accumulation neuronale d’une protéine Tau anormale, la protéine Tau 4R (également nommée Tau 0N/4R ). Dans cet article, les auteurs ont généré des poissons-zèbres transgéniques exprimant la protéine Tau humaine 0N/4R afin d’étudier la physiopathologie de la PSP. Les résultats montrent que les poissons-zèbres Tau 0N/4R présentent plusieurs caractéristiques de la PSP, notamment : une diminution de la durée de vie, une hypokinésie, des troubles oculomoteurs (= troubles de la motricité des globes oculaires), des signes neuropathologiques de neurodégénérescence (perte synaptique) et de neuroinflammation.  Dans ce modèle la protéine Tau est tronquée et hyperphosphorylée, forme des oligomères et présente des altérations de son repliement, de sa localisation et de sa solubilité. Les auteurs ont ensuite réalisé un screening automatisé de 147 petites molécules sur la base de leur capacité à corriger les déficits neurologiques chez les poissons-zèbres Tau 0N/4R. La molécule (+)JQ1, un inhibiteur des protéines à bromodomaine  a démontré ses effets thérapeutiques sur l'hypokinésie, la survie, la microgliose et la perte synaptique cérébrale. Confirmant ces résultats, une mutation hétérozygote brd4+/− qui réduit l'expression de la protéine à bromodomaine Brd4 corrige également le phénotype observé dans ce modèle.  De plus, les auteurs montrent que la phagocytose de matériel synaptique par les cellules microgliales est réduite par le composé (+)JQ1, que ce soit chez les poissons-zèbres Tau 40N/4R ou dans des cultures corticales primaires de rat.  Enfin, les auteurs mettent en évidence l’expression de BRD4 par la microglie humaine dans les cerveaux de patients atteints de PSP.

Les brèves du Bulletin N°42 

 

Article N°1

Yutong Guo et al.

Des ultrasons à fréquence définie peuvent moduler la dynamique de microbulles dans les vaisseaux cérébraux et contrôler la réponse inflammatoire au niveau de la barrière hémato-encéphalique.

Nature Communications - Septembre 2024

 

Article N°2

Akiyuki Uzawa et al.

NMOSD et MOGAD : un spectre évolutif de maladies démyélinisantes.

Nature Reviews Neurology - Septembre 2024

 

Article N°3

Sarah Louise Christensen et Dan Levy

Article de revue - Rôle des méninges cérébrales dans l’étiopathogénie des migraines.

Trends in Neurosciences - Septembre 2024

 

Article N°4

Rose Ana Summers et al.

Article de revue - Nouveaux modèles iPSC humains de neuroinflammation : applications à l’étude des maladies neurodégénératives et à la médecine régénérative.

Trends in Immunology - Septembre 2024

 

Article N°5

Deniz Karabag et al.

Article de revue - Contributions potentielles de la sénescence cellulaire dans la progression des tauopathies.

Trends in Immunology - Septembre 2024