Bulletin N°23

Les auto-anticorps associés au lupus déclenchent un processus neuroinflammatoire maintenu par la signalisation HMGB1/RAGE et régulé négativement par LAIR-1 – Nature Immunology – Mars 2024

Kaitlin R.Carroll et al.

Des troubles cognitifs invalidants sont observés dans une proportion pouvant atteindre 80% des patients atteints de formes neuropsychiatriques de lupus erythémateux systémique (LES). Dans cette étude, les auteurs ont analysé un modèle murin de LES pour identifier les mécanismes d’altérations cognitives associées à cette pathologie auto-immune. Les auteurs montrent que dans ce modèle, les troubles cognitifs surviennent concomitamment au passage dans l’hippocampe d’anticorps dirigés contre les récepteurs neuronaux excitateurs. Ces anticorps provoquent une mort neuronale par excitotoxicité, mais également une perte significative de la complexité dendritique dans les neurones survivants. Ces lésions initiales sont à l’origine d’anomalies neuropathologiques et fonctionnelles qui persistent pendant au moins 1 an. Durant cette phase chronique, les auteurs identifient une boucle d'activation microgliale conduisant à l’élimination inappropriée de synapses. Ce processus dépend de la sécrétion neuronale de la protéine HMGB1 qui se lie au récepteur RAGE et entraîne la sécrétion microgliale de C1q ainsi que la régulation négative de LAIR-1, un récepteur inhibiteur. L’ensemble de ces anomalies peut être efficacement traité par l’administration systémique d’un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine.

Au décours d’une ischémie cérébrale, l’histone désacétylase HDAC3 régule la prolifération de sous-populations microgliales spécifiques – Science Advances - Mars 2024

Yue Zhang et al.

Lors d’un accident vasculaire cérébral (AVC) d’origine ischémique, on observe dans la zone dite « de pénombre » (= la zone tissulaire entourant la région infarcie), une polarisation des cellules microgliales et leur prolifération in situ. Ce processus neuroinflammatoire conduit à des lésions secondaires de type perte neuronale et démyélinisation. Dans ce travail, les auteurs ont utilisé un modèle murin d’AVC ischémique pour étudier le rôle de l’histone désacétylase (HDAC) dans la microgliose et la polarisation microgliale observées durant la période post-AVC. Les auteurs montrent que le KO conditionnel d’HDAC3 dans les cellules microgliales améliore les scores fonctionnels et histologiques aux stades tardifs de l’AVC. L'analyse RNA-seq sur cellule unique révèle que le KO microglial d’HDAC3 affecte spécifiquement la prolifération des cellules microgliales pro-inflammatoires. De plus, la technique d'ATAC-seq (« Assay for Transposase-Accessible Chromatin with highthroughput sequencing) démontre que le KO d’HDAC3 rend inaccessible les motifs ADN (« DNA binding sites ») reconnus par le facteur de transcription PU.1. A contrario, la surexpression microgliale de PU.1 via l’utilisation d’un vecteur adénoviral annule l'inhibition de la prolifération induite par le KO d'HDAC3. Ce résultat montre bien que le KO d’HDAC3 impacte essentiellement les effets exercés par PU.1 sur la prolifération et la polarisation des cellules microgliales.

La cholestérol 25-hydroxylase promeut la neuro-inflammation et la neurodégénérescence dans un modèle murin de tauopathie – Journal of Expérimental Medicine – Mars 2024

Danira Toral-Rios et al.

Une réaction neuro-inflammatoire et un dysfonctionnement du métabolisme lipidique cérébral sont observés dans la maladie d'Alzheimer (AD). L’enzyme « cholestérol 25-hydroxylase »(Ch25h) permet la synthèse de 25-hydroxycholestérol (25-HC), qui exerce de nombreux effets sur l'inflammation et le métabolisme lipidique. Chez la souris, dans différents modèles expérimentaux, l’expression de Ch25h est augmentée dans les cellules microgliales associées aux pathologies (DAM pour "disease-associated microglia"). Cependant, on ne sait pas si, et comment la Ch25h microgliale peut influencer la neuro-inflammation et la neurodégénérescence dans le contexte d’une tauopathie. Dans cette étude, les auteurs montrent que, dans le modèle de tauopathie P301S, le KO de Ch25h et la réduction de 25-HC qui en découle entraînent une neurodégénérescence et une neuro-inflammation considérablement réduites, dans l'hippocampe et le cortex entorhinal/piriforme. Cet effet est dépendant de l’âge. Les analyses RNA-seq sur cellule unique ou sur tissu hippocampique total confirment que la déficience en Ch25h régule négativement et de façon majeure la signalisation pro-inflammatoire dans la microglie.

La régulation de NLRP3 et son rôle dans les maladies neuroinflammatoires du système nerveux central est spécifique d’espèce – Cell Reports – Mars 2024

Beverly H.Koller et al.

L'inflammasome NLRP3 déclenche l'activation de la caspase-1 (CASP1) et la libération de l'IL-1β, de l'IL-18 et de la gasdermine-D dans les cellules myéloïdes. Cependant, dans quelle mesure ces effets sont spécifiques d’espèce reste une question peu investiguée. Dans cet article, les auteurs ont généré des souris portant le gène NLRP3 humain (hNLRP3), sous le contrôle soit du promoteur humain, soit du promoteur murin. Les résultats montrent que les deux promoteurs sont fonctionnels dans les cellules myéloïdes, mais le promoteur murin répond de manière plus robuste à une induction de l’inflammasome par le lipopolysaccharide (LPS). L’introduction de la mutation gain de fonction D305N dans les deux lignées humanisées conduit à une inflammation chronique prononcée avec les deux promoteurs. Cependant, l’impact sur la neuro-inflammation varie considérablement selon le promoteur. Malgré une faible réponse au LPS, le promoteur humain en amont de D305N entraîne une méningite aseptique, ce qui n’est pas le cas pour le promoteur murin.

L'APOE issue de vésicules extracellulaires astrocytaires exerce des effets protecteurs dans un modèle murin de NMOSD – Science Translational Medicine – Février 2024

Shihe Jiang et al.

La neuromyélite optique (NMO ou NMOSD pour «neuromyelitis optica spectrum disorder ») est une astrocytopathie auto-immune induite par des auto-anticorps dirigés contre la protéine canal aquaporine-4 (AQP4). Les dommages causés primitivement aux astrocytes s’accompagnent d’une démyélinisation et de lésions axonales secondaires. Dans le contexte de la NMO, la communication intercellulaire via les vésicules extracellulaires dérivées d’astrocytes (ADEVs pour « astrocyte-derived extracellular vesicles ») a suscité un intérêt scientifique croissant. Cependant, les mécanismes par lesquels les ADEVs contribueraient à la pathogenèse de la NMO restent peu clair. Dans cette étude, les auteurs ont réalisé un profilage protéomique des ADEVs et montré une augmentation des ADEVs riches en apolipoprotéine E (APOE) chez les patients atteints de NMO. Dans un modèle murin de NMO, l'injection intracérébrale du peptide APOE130–149 a permis d’atténuer l’activation microgliale, la neuro-inflammation et les lésions cérébrales. L'effet protecteur de l’APOE130–149 a pu être également démontré dans un modèle de NMO induit chez des souris KO en APOE. De plus, le knock-down du récepteur de l'APOE, la protéine LRP1, a annulé les effets protecteurs de l'APOE130–149. Enfin, les auteurs montrent que l’administration systémique d'ADEVs dérivées de patients atteints de NMOSD ou de témoins sains exerce aussi des effets neuroprotecteurs et anti-inflammatoires dans le modèle murin de NMOSD. Ces résultats indiquent que l'APOE issue de vésicules extracellulaires astrocytaires pourrait relayer une interaction astrocyte-microglie exerçant des effets protecteurs.

Le facteur de croissance HB-EGF, produit par les astrocytes, exerce des effets immunomodulateurs et neurotrophiques dans le modèle de l’EAE – Nature Immunology – Février 2024

Mathias Linnerbauer et al.

Sur la base d’analyses protéomiques de liquide céphalorachidien et d’études expérimentales in vitro et in vivo, les auteurs identifient le facteur de croissance HB-EGF comme un médiateur majeur de mécanismes anti-inflammatoires et protecteurs de tissus dans la sclérose en plaques. L’analyse du modèle de l’encéphalite auto-immune expérimentale (EAE), montre que l’inflammation précoce du système nerveux central s’accompagne de conditions hypoxiques entraînant la surexpression rapide de l’HB-EGF par les astrocytes. Toutefois, l’inflammation induit des modifications épigénétiques qui altèrent la signalisation trophique déclenchée par HB-EGF. En utilisant une grande variété de types cellulaires in vitro, les auteurs mettent en évidence les effets anti-inflammatoires et protecteurs de tissus exercés par l’HB-EGF. Enfin, l'administration intranasale d’HB-EGF aux stades aigus et post-aigus de l’EAE réduit significativement les signes cliniques et neuropathologiques de la maladie.

Les brèves du Bulletin N°23

 

Article N°1

Benjamin Sarton et al. 

Selon l’étiologie anoxique ou traumatique du coma chez des patients hospitalisés, l’imagerie TSPO-PET  met en évidence des différences significatives quant à la cinétique et la distribution spatiale de la neuro-inflammation.

 BRAIN – Février 2024

 

Article N°2

Arnaud Marie et al.

Article de revue - L’activation immune chronique dans la maladie d’Alzheimer.

Annual Reviews of Immunology– Février 2024

 

Article N°3

Aletta M. R. van den Bosch et al.

L’analyse du profil moléculaire des nodules microgliaux suggère leur implication dans le développement ultérieur de lésions chez les patients atteints de sclérose en plaques.

Nature Communications – Février 2024