Bulletin N°21

L'infection par le virus monkeypox des astrocytes humains entraîne le clivage de la gasdermine B et la pyroptose – PNAS - Février 2024

Hajar Miranzadeh Mahabadi et al.

Le virus monkeypox (MPXV) encore appelé variole du singe, provoque chez l’homme des troubles neurologiques et présente, dans les modèles animaux, un neurotropisme clairement démontré. La pyroptose est une mort cellulaire programmée d’un type particulier, induite par activation de l’inflammasome et caractérisée, entre autres, par le clivage et l’assemblage d’une famille de  molécules :  les  gasdermines. Ces molécules assemblées forment des pores membranaires lytiques. Dans cette étude, les auteurs ont examiné dans des cellules humaines le potentiel neurotrope et pyroptotique du MPXV. Un autre orthopoxvirus, le virus de la vaccine (VACV) a été utilisé à titre de comparaison. Dans ces expériences, les astrocytes se sont avérés les plus sensibles à l’infection par le MPXV (et le VACV), suivis par les cellules microgliales et les oligodendrocytes. Les neurones sont apparus peu sensibles à l’infection par le MPXV. Des altérations morphologiques ont pu être observées dans les astrocytes infectés par le MPXV. Cet effet cytopathique s’accompagne de l’accumulation intracellulaire de plus de 125 protéines encodées par le MPXV et détectables par spectrométrie de masse ou immunomarquage (protéine virale I3). Les astrocytes infectés par le MPXV ou le VACV ont montré une augmentation de l'expression des transcrits des gènes immuns IL-12, IRF3, IL-1β  , TNF-alpha, CASP1 et GSDMB. Cependant, seule l’infection par le MPXV a pu induire le clivage protéolytique de la gasdermine B (GSDMB) (50 kDa), conduisant à la génération de fragments clivés N-terminaux (30 kDa) et C-terminaux (18 kDa) de GSDMB. Les auteurs ont pu démontrer que ce clivage de GSDMB est associé à une rupture de la membrane plasmique astrocytaire et la libération de lactate déshydrogénase.

Article de revue - Coopérations entre cellules endothéliales et macrophages dans le cerveau sain ou pathologique – Acta Neuropathologica – Février 2024

Adam Denes et al.

Au cours de nombreuses maladies du système nerveux central (SNC), on observe de façon concomitante des perturbations vasculaires et une réaction inflammatoire impliquant les macrophages du SNC. Ceux-ci comprennent deux sous-populations cellulaires : i) les macrophages « associés » au SNC (CAMs pour « CNS-associated macrophages »), également appelés macrophages associés aux bordures (BAMs pour « border-associated macrophages”) et ii) les cellules microgliales. Ces deux sous-populations interagissent de manière directe ou indirecte avec les cellules endothéliales des microvaisseaux. Des travaux récents indiquent que dans le SNC, les macrophages et les cellules endothéliales peuvent dériver de progéniteurs communs érythromyéloïdes (= progéniteurs capables de générer des globules rouges et des cellules immunitaires du lignage myéloïde). Les macrophages et cellules endothéliales issus de ces progéniteurs partagent plusieurs caractéristiques communes quant à leurs modalités de colonisation du SNC embryonnaire et aux mécanismes régissant leur prolifération puis leur extinction. Par ailleurs, dans le cerveau adulte, les cellules microgliales et les CAMs contribuent à réguler la perméabilité et le diamètre des vaisseaux sanguins, le processus de calcification des vaisseaux ainsi que la durée de vie des cellules endothéliales. Inversement, les cellules endothéliales impactent la polarisation et l'état d'activation des cellules microgliales et des CAMs. Les mécanismes moléculaires régissant ce "pas de deux" entre macrophages et cellules endothéliales commencent à être décryptés et sont passés en revue dans cet article.

Article de revue - Du rôle de la niche : origine, fonction et devenir des différentes catégories de macrophages associés au cerveau en situation normale ou pathologique – Acta Neuropathologica– Février 2024

Adrià Dalmau Gasull et al.

La dure-mère, les leptoméninges, l'espace périvasculaire et l'épithélium des plexus choroïdes constituent des barrières structurales à composantes cellulaires et acellulaires. Chacune de ces structures accueille des populations myéloïdes distinctes qui proviennent principalement de progéniteurs érythromyéloïdes (EMP pour « erythromyeloid progenitors » = progéniteurs capables de générer des globules rouges et des cellules immunitaires du lignage myéloïde) issus du sac vitellin (= vésicule vitelline). Ces progéniteurs colonisent le SNC durant l'embryogenèse et, selon leur localisation dans des sites micro-anatomique spécifiques, génèrent des populations macrophagiques distinctes. Ces populations diffèrent quant à leur phénotype, leur durée de vie et les modalités de leur renouvellement à partir d’éléments sanguins. En particulier, alors que certaines cellules dérivées d'EMP colonisent le parenchyme pour se différencier en cellules microgliales, d'autres s'implantent dans les méninges et génèrent des macrophages « associés » au SNC (CAM pour « CNS-associated macrophages »), également appelés macrophages associés aux bordures (BAMs pour « border-associated macrophages”). C’est le cas des macrophages leptoméningés. Chez la souris, en situation homéostatique, les cellules sanguines issues de la moelle osseuse contribuent très peu au renouvellement des macrophages méningés et des macrophages périvasculaires, mais sont indispensables au renouvellement des macrophages de la dure-mère et des plexus choroïdes. Toutefois, dans des conditions pathologiques où la barrière hémato-encéphalique est compromise, des cellules sanguines issues de la moelle osseuse peuvent coloniser le SNC et participer au renouvellement de l’ensemble des populations myéloïdes du SNC. Dans le même temps, les CAM peuvent également proliférer in situ et engager des programmes d’activation spécifiques. Ainsi, les cellules myéloïdes résidentes et infiltrantes peuvent co-exister au sein des mêmes niches anatomiques et façonner la physiopathologie de nombreuses maladies du SNC.

Analyse transcriptomique de la microglie et des macrophages bordant les lésions chroniques actives de substance grise et de substance blanche chez les patients atteints de sclérose en plaques. – Annals of Neurology – Février 2024

Anthony Chomyk BS et al.

Dans les cerveaux de patients atteints de sclérose en plaques, des cellules microgliales et des macrophages bordent les lésions de démyélinisation aussi bien dans la substance blanche que dans le cortex. Il est actuellement admis que ces cellules sont responsables de l'expansion lente des lésions de substance blanche et de la progression du handicap. En revanche, les cellules myéloïdes bordant les lésions de substance grise sont moins bien caractérisées. C’est ce qui a été réalisé dans cette étude via une approche associant microdissection laser, analyse RNA-seq sur cellule unique (« single-cell RNA-seq ») et immunocytochimie. Les résultats montrent que dans les cellules microgliales, les transcrits associés à l'activation immunitaire et à l'homéostasie du fer sont augmentés en bordure des lésions de substance blanche. Toutefois, dans les cellules microgliales bordant les lésions de substance grise, ce profil n’est pas retrouvé et l’on observe une augmentation des transcrits appartenant à la voie de signalisation Wnt. Les auteurs proposent que les mécanismes de démyélinisation et la dynamique gouvernant l'expansion des lésions sont distincts selon la localisation des lésions. Les données transcriptomiques suggèrent par ailleurs que l'expression accrue du récepteur Fc epsilon et de la tyrosine kinase de Bruton jouent un rôle clé dans la régulation des fonctions microgliales et macrophagiques bordant les lésions chroniques de substance blanche.

Les cellules T régulatrices (Treg) utilisent l'héparanase pour accéder à l'IL-2 liée à la matrice extracellulaire dans les tissus inflammatoires – Nature Communications – Février 2024

Hunter A. Martinez et al.

Bien que les cellules T régulatrices (Treg pour « regulatory T-cells ») FOXP3+ dépendent de l'IL-2 produite par d'autres cellules pour leur survie et leur fonction, les niveaux d'IL-2 dans les tissus inflammatoires sont faibles ce qui pose la question de l’accessibilité de l’IL2 aux Treg in situ. Dans cet article, les auteurs montrent qu’en situation neuroinflammatoire, les Treg utilisent l'heparanase (HPSE) pour accéder à l'IL-2 séquestrée par l'heparane sulfate dans la matrice extracellulaire. Par ailleurs, le niveau d’expression d’HPSE distingue les Treg des cellules T conventionnelles et est régulé par la disponibilité de l'IL-2. Les Treg HPSE KO présentent une stabilité et une fonction altérées in vivo, y compris dans le modèle murin de l'encéphalomyélite auto-immune expérimentale (EAE). A contrario, des Treg surexprimant HPSE et un récepteur antigénique chimérique (« CAR T-cells ») dirigé contre la protéine de myéline MOG  présentent une capacité accrue à inhiber la neuroinflammation et à capter l'IL-2 séquestrée par l’heparane sulfate.